« Il y a toujours une raison qui pousse les personnes à agir d’une façon dangereuse. »
Rencontrez le gardien
Jack de Graaf est responsable de l’Environnement, de la Santé et de la Sécurité (Environment, Health and Safety, EHS) de Teva en Europe. C’est à lui qu’il revient de s’assurer que les nombreux sites de R&D, usines européennes et bureaux de l’entreprise sont sûrs. La Journée mondiale de la sécurité et de la santé au travail de l’ILO approchant, il parle de la sécurité de 14,000 personnes, de la possibilité d’un désastre si les choses tournent mal... et il explique pourquoi il se sent un peu comme la mère de Teva.
La sécurité des employés est ma principale responsabilité. Mon travail consiste à m’assurer que les directeurs généraux et l’équipe de direction de leur site veillent à la sécurité de nos usines, bureaux et sites de R&D, de sorte que toute personne qui entre dans nos établissements le matin en ressorte indemne à la fin de la journée.
Dans les entreprises pharmaceutiques, toute catastrophe sur site a des retombées énormes. Si la production doit s’arrêter et que vous ne pouvez pas fournir les produits à vos patients, les conséquences sont désastreuses. Dans l’industrie pharmaceutique, si vous ne fournissez pas les médicaments nécessaires, des personnes peuvent mourir.
14 000 personnes travaillent chez Teva en Europe. La société compte 19 sites de fabrication employant jusqu’à 9 000 personnes et 5 000 personnes supplémentaires travaillent dans des bureaux et des entrepôts. Cela fait beaucoup de personnes à protéger.
Je ne peux jamais me rendre dans un site sans vérifier la chaufferie. Dans mes fonctions précédentes, je me trouvais sur un site de fabrication lorsqu’une chaudière a explosé, causant des dommages graves. Heureusement, il n’y a pas eu de décès, mais la moitié de la ville dans laquelle se trouvait le site n’avait plus d’eau. Cela a causé des millions de dollars de dommages et la production d’un médicament qui peut changer la vie des patients a été arrêtée pendant six semaines. Nous avons garanti la sécurité de la chaîne d’approvisionnement, mais c’était une situation difficile que je ne veux plus jamais revivre.
L’exposition potentielle à des composés puissants est un grand risque dans le secteur pharmaceutique. Les produits que nous fabriquons pour nos patients sont bons pour eux, mais ils peuvent être nocifs pour les personnes qui les fabriquent ou qui se trouvent dans un environnement où la production est réalisée, lorsqu’elles sont surexposées à des composés comme des hormones ou des cytostatiques (médicaments qui inhibent la croissance cellulaire). Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour éviter cette situation. C’est pourquoi nous devrons effectuer des évaluations des risques pour atténuer les risques moyens et élevés.
Nous travaillons dur pour transmettre la même culture de sécurité dans tous nos sites. Teva a acquis un grand nombre de sociétés en Europe et nous devons harmoniser nos cultures. C’est toujours difficile parce que, quand on parle de culture, c’est aussi bien du point de vue national que du point de vue d’une entreprise. On peut chercher à trop harmoniser les choses, au point que tout se confond en une seule procédure ou une seule norme. Il faut prendre en compte les pratiques ou aspects culturels locaux qui pourraient fonctionner dans certains domaines.
Ce que je redoute le plus, c’est que les gens suivent les règles de santé et de sécurité sans y réfléchir. C’est le défi avec l’Environnement, la Santé et la Sécurité (EHS). Vous devez créer des règles et définir des normes, mais si les gens arrêtent de réfléchir, les choses tournent mal.
« Il y a toujours une raison qui pousse les personnes à agir d’une façon dangereuse. » Les gens ne sont pas enclins à se comporter de façon dangereuse, mais ils le font pour de nombreuses raisons : il se pourrait que la procédure ne soit pas viable, qu’ils ne disposent pas des bons outils ou que l’équipement soit mal conçu. Dans de nombreux cas, le comportement est motivé par la direction. La direction a la grande responsabilité de s’assurer que les employés peuvent faire leur travail en toute sécurité.
Je vois l’EHS comme la mère de toute organisation. Lorsqu’une entreprise a un bon environnement et une bonne culture EHS, cela influence l’ensemble du fonctionnement. Si l’EHS est bien organisé, il est probable que vos opérations soient aussi bien organisées. Je pense qu’il y a une relation entre les deux. Si votre EHS est médiocre, votre performance opérationnelle est également susceptible d’être médiocre.
Il y a beaucoup de coaching dans mon travail. Pendant environ 30 % à 50 % de ma semaine, je coache les responsables EHS locaux et je leur explique comment créer un lieu de travail plus sûr. Le reste consiste principalement à mettre en place des lignes directrices et des modèles de stratégie pour l’avenir afin de mélanger différentes cultures du milieu de travail en une seule.
De nombreux éléments entrent en jeu dans l’EHS. Il ne s’agit pas uniquement de la sécurité, mais aussi des personnes et de l’environnement. Il y a aussi un élément social. On sent que son travail ne se limite pas à la société, on agit pour le bien de l’humanité. Cela peut sembler ridicule, mais parfois on a cette impression.
Les directeurs généraux me remercient deux à trois fois par semaine. L’argent, c’est bien pour un grand nombre de raisons, mais c’est encore mieux d’être reconnu et récompensé pour la contribution que l’on apporte à une société. C’est très motivant.